Les indicateurs du bilan social en matière de formation professionnelle sont souvent présentés comme obligatoires. Pourtant, tout a changé en 2018 faute de décret d’application. Nous faisons le point sur cet instrument de pilotage sous l’angle des indicateurs de formation professionnelle.
Le bilan social prévu par le Code du travail fait couler beaucoup d’encre. Parfois complexes à appréhender, les indicateurs du bilan social sont présentés comme des obligations pour l’employeur.
Le bilan social est-il vraiment obligatoire ? Quelles en sont les obligations en matière de formation professionnelle ? Et dans la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) ? Voici notre fiche pratique et juridique.
Le bilan social et la formation professionnelle : est-ce vraiment obligatoire ?
L’arrivée du printemps sonne bientôt l’heure du bilan social et de ses indicateurs obligatoires avec la date du 15 avril citée comme étant la date limite de la transmission du bilan social au CSE.
Né en 1977, le bilan social est loin d’être un nouveau venu dans le pilotage des ressources humaines de l’entreprise. Document établi par l’employeur récapitulant les principales données chiffrées sur la situation sociale de l’entreprise de l’année écoulée et des 2 années précédentes, il s’est imposé à la fois comme obligation légale pour les entreprises d’au moins 300 salariés et comme instrument de management social.
Suivant le canevas imposé réglementairement, les informations devant figurer dans le bilan social sont regroupées en 7 chapitres portant respectivement sur :
- l’emploi ;
- les rémunérations et charges accessoires ;
- la santé et la sécurité au travail ;
- les autres conditions de travail (durée et aménagement du temps de travail, organisation, conditions physiques du travail) ;
- la formation professionnelle ;
- les relations professionnelles ;
- les conditions de vie des salariés (activités sociales, charges sociales).
Voilà qui fait dire trop vite que la formation professionnelle relève des données à faire figurer obligatoirement dans le bilan social. Une mise à jour essentielle s’impose à la lecture de la législation en vigueur.
Le cadre réglementaire incomplet du bilan social : un question d’actualité depuis 2018
Force est de constater que beaucoup d’articles du Code de travail trop vite cités ont été abrogés au 31 décembre 2017. Plutôt que de nous perdre dans des informations mal glanées, plongeons-nous dans les textes en vigueur puisque le Code du travail continue à se référer au bilan social (articles L. 2312-28 à L. 2312-35).
C’est ainsi que l’article L. 2312-28 du Code du travail prévoit que les entreprises d’au moins 300 salariés doivent mettre les données du bilan social à disposition du CSE à travers la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE).
Logique juridique oblige, vous vous demandez quelles sont les données à y inclure ? Existe-il une obligation d’inclure les données de la formation professionnelle ? Direction l’article L. 2312-30 du Code du travail qui définit le bilan social dans les termes d’antan. La pierre d’achoppement : le législateur a indiqué que le contenu des informations serait précisé par décret. Or, celui-ci se fait attendre depuis 2018.
Résultat des courses : s’il est indéniable que bilan social et la BDESE ont fusionné, la question est de savoir comment peut-on rédiger un bilan social dont le contenu obligatoire devait être fixé par un décret toujours attendu ? Et plus encore, comment y voir des obligations de contenu liées à la formation professionnelle ?
La BDSE : alternative aux obligations perdues du bilan social en matière de formation professionnelle ?
Les articles L. 2312-31 et L. 2312-32 du Code du travail en vigueur depuis 2018 indiquent que les données du bilan social doivent être mises à disposition des travailleurs qui en font la demande, mais aussi auprès de l’inspection du travail avec avis du comité d’entreprise. Elles doivent également être disponibles pour les actionnaires quand il s’agit de sociétés par actions.
Nous revoilà avec le même écueil : ce décret jamais publié. Depuis le 1er janvier 2018, il n’existe donc plus d’obligation légale de rédiger un bilan social. En gardant à l’esprit la fusion entre la BDESE, née en 2013, et bilan social, nous pouvons dire que la seule obligation est de produire une base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE).
Imposée aux entreprises qui emploient au moins 50 salariés, la BDESE est une base de données constamment mise à jour reprenant les informations nécessaires aux consultations et informations récurrentes mises à disposition du comité économique et social (CSE) :
- investissement social ;
- investissement matériel et immatériel ;
- égalité professionnelle entre hommes et femmes ;
- fonds propres, endettement et imposition ;
- rémunération des salariés, dirigeants et financeurs ;
- flux financiers, partenariats, transferts commerciaux et financiers ;
- environnement.
La formation professionnelle est aux abonnés absents dans la BDESE !
Face à ces incohérences réglementaires, les entreprises ne savent plus sur quel pied danser. Raison pour laquelle, beaucoup continuent à élaborer un bilan social respectant le schéma obligatoire abrogé le 31 décembre 2017 et à actualiser la BDESE en y incluant les mentions obligatoires prévues par accord d’entreprise ou de branche et, à défaut, par le Code du travail.
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Bilan social et formation professionnelle : des obligations ?
Venons-en maintenant à notre question de départ : quelles sont vos obligations en matière de formation professionnelle en rapport avec le bilan social ?
Il n’y a aucune obligation ! Cependant, comme le font beaucoup d’entreprises, rien ne vous empêche de respecter le prescrit de la législation antérieure au 1er janvier 2018.
C’est donc sur une base volontaire que vous pouvez produire un chapitre 5 dédié à la formation en y incluant les données chiffrées relatives aux points suivants :
- Formation professionnelle continue dans l’entreprise :
- Pourcentage de la masse salariale affectée à la formation continue
- Budget dédié aux actions de formation continue avec sa répartition :
- Formations internes ;
- Formations données en application de conventions ;
- Versement à des fonds d’assurance formation et à des organismes agréés ;
- Nombre de stagiaires ;
- Nombre d’heures de stage rémunérés et non-rémunérés ;
- Répartition par type de stages : formation professionnelle, adaptation, entretien ou perfectionnement des connaissances.
- Congés formation :
- Nombre de salariés ayant bénéficié d’un congé formation (rémunéré et non-rémunéré) ;
- Quantité de travailleurs s’étant vu refuser le congé formation.
- Apprentissage :
- Nombre de contrats d’apprentissage dans l’année.
Nous pouvons parler de bonne pratique, tout spécialement quand le Code du travail fait toujours référence à cet outil qui a pour vocation de photographier chaque année la situation de l’entreprise sous des angles à la fois comptables, fiscaux, sociaux et formation professionnelle.
Si le bilan social reste un outil d’analyse stratégique et un instrument de communication à la fois connu et efficace, il n’en reste pas moins que la réalité juridique est qu’aucune sanction pécuniaire n’existe. Ni pour défaut de rédaction, ni pour retard dans son élaboration et encore moins pour ne pas avoir respecté des mentions relatives à la formation professionnelle et aux compétences.
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À défaut d’obligations en matière de formation professionnelle dans le bilan social, la base de données économiques, sociales et environnementales en impose-t-elle ?
Cette base de données qui centralise les informations économiques et sociales de l’entreprise et les rend accessibles aux représentants du personnel, n’exige rien en matière de formation professionnelle. Cela dit, rien ne vous empêche d’y intégrer les données relatives aux actions de formations et au développement des compétences dans votre entreprise.
En conclusion
Sur fond de réglementation déficiente, le bilan social repris par le Code du travail ne met à charge de l’employeur aucune obligation en matière de formation professionnelle.
Si la BDESE n’impose rien non plus à l’entreprise, il ne faut cependant pas perdre de vue l’utilité des indicateurs traditionnellement développés dans les bilans sociaux en termes de pilotage de la formation professionnelle de l’entreprise. Mais utilité ne rime pas avec obligation.
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